L’improvisation à l’école présente plusieurs avantages, non seulement pour le développement du langage, mais aussi dans d’autres sphères importantes du développement des jeunes de tous âges. En pratiquant cet art, ils développent un large éventail de compétences transversales qui feront d’eux les étoiles du match !
L’improvisation théâtrale représente un outil d’apprentissage remarquable dans un cadre scolaire. Dans un match d’improvisation, les élèves sont à la fois acteurs, dramaturges, metteurs en scène et scénographes. En équipe, ils se mesurent devant public, en déployant leurs talents pour le jeu théâtral, sans mise en scène ou texte prédéfinis. Ils improvisent pendant un temps donné, sur une aire de jeu appelée « patinoire », en inventant une histoire sur un sujet communiqué quelques secondes à peine avant le début de leur performance. Un arbitre assure le respect des règles du jeu, et le public choisit l’équipe gagnante.
« Les élèves doivent travailler en équipe, définir leurs intentions, choisir un vocabulaire adapté et développer un sketch autour d’un fil conducteur logique. Ils utilisent leur corps pour donner vie à des personnages, et les mettent en action par le biais du mime », explique Isabel Goguen, directrice générale d’Improvisation Nouveau-Brunswick, qui pratique cet art depuis près de 20 ans.
Une alliée précieuse en enseignement du français
Dès la maternelle et tout au long du primaire, l’improvisation favorise le développement des compétences langagières en français. Par exemple, elle renforce les habiletés des élèves à raconter un événement dans une séquence logique, un objectif d’apprentissage du programme d’étude en français de la maternelle à la 3e année dans plusieurs provinces. De la 4e à la 8e année, l’improvisation permet aussi d’atteindre d’importantes cibles d’apprentissage, comme s’exprimer devant un groupe, respecter les tours de parole et accueillir les idées des autres, le tout dans le cadre d’une activité ludique et fédératrice qui favorise une association positive avec la langue.
L’improvisation est tout aussi utile dans le cheminement scolaire des élèves plus âgés. Elle leur permet d’approfondir leur usage de la langue, tant à l’oral qu’à l’écrit. Les histoires inventées peuvent adopter des styles plus complexes, amenant les élèves à jouer avec différents éléments prosodiques (ton, débit, volume de la voix) et stylistiques (comparaison, métaphore, énumération, répétition, ellipse, inversion, apostrophe, onomatopée). Ils peuvent même improviser à la manière d’un auteur étudié en classe, en s’inspirant de son univers et en reprenant ses codes et ses types de personnages.
« En mettant les jeunes en scène, avec leurs accents et dialectes, on valorise et on valide leur forme vivante d’expression en français, et on renforce leur sentiment d’appartenance à la communauté francophone », souligne Isabel Goguen.
L’improvisation peut aussi servir de base à une production écrite, comme l’explique la chercheuse Roxanne Gagnon dans son article « L’improvisation théâtrale au service de l’expression orale et écrite et de son enseignement » (Revue suisse des sciences de l’éducation, 2011). « De façon concrète, l’enseignant qui veut faire apprendre l’écriture dramaturgique à ses élèves peut procéder […] en les faisant improviser par petits groupes sur la base d’un thème. Après ces productions initiales, les groupes annotent les idées qui leur semblent intéressantes pour une éventuelle saynète. »
Une source d’ouverture aux autres et de confiance en soi
Au-delà de la maîtrise de la langue, l’improvisation soutient le développement personnel et interpersonnel, et favorise l’ouverture à l’autre et une meilleure confiance en soi. Rapidement, les élèves apprennent à accepter leurs erreurs et à adopter une attitude bienveillante envers eux-mêmes et leurs camarades. « En improvisation, il n’y a pas de réponses justes ou fausses. Ce qui importe, c’est d’exprimer sa créativité en acceptant celle des autres », souligne Isabel Goguen.
Dans « L’improvisation théâtrale : une pédagogie de l’expérimentation » (Les Cahiers pédagogiques, 2017), les chercheurs Mathieu Hainselin, Magali Quillico et Gustave Parking précisent : « Quand [les élèves] comprennent que toutes leurs propositions sont acceptables, la confiance s’installe, la peur du ridicule s’atténue (surtout chez les adolescents) et le plaisir de partager son imaginaire prend le dessus. »
Une discipline de choix pour l’enseignement de l’art dramatique
Enfin, en pratiquant l’improvisation, les élèves mettent en pratique leurs talents d’interprète. Ils doivent exprimer des émotions pour que leurs histoires soient crédibles et touchantes, un aspect qui fait partie des compétences à développer dans le cadre du programme d’art dramatique. Cet apprentissage permet aux élèves de mieux comprendre les sentiments qui les habitent dans leur vie personnelle et, à terme, de mieux les exprimer.
Gérer le trac et trouver le courage de se lancer, sans filet, dans une interprétation, développent à la fois les compétences relationnelles et la capacité à gérer les défis de communication, comme le rapporte Olivier Marty dans « Lumières sur l’improvisation théâtrale : trois usages éducatifs d’une pratique sociale innovante » (Éducation permanente, 2013). « Ce contrôle de ses émotions est un apprentissage primordial ; il s’acquiert par l’improvisation théâtrale tout autant qu’au théâtre, et facilite les interactions sociales en leur donnant une dimension affective et émotionnelle de première importance. »
Expression orale, utilisation de la langue, coordination physique, construction de l’identité francophone… L’improvisation théâtrale à l’école contribue à d’innombrables facettes du développement de l’élève. Le personnel enseignant a donc tout intérêt à sauter sur la patinoire !
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